Compte-rendu de la réunion publique organisée par l’ADTT, le 27 octobre 2016

Le président de l’ADTT, Jean-François Troin, introduit la réunion en précisant ce que l’ADTT attend de cette conférence.
Dans le cadre de ses actions d’information et de pédagogie, l’ADTT a souhaité apporter quelques lumières sur le coût des tramways. Avant le choix d’une 2ème ligne, que nous appelons de nos vœux car une ville qui se veut Métropole doit pouvoir s’appuyer sur un réseau, nous avons donc fait appel à l’expérience d’un constructeur de tramways, CAF, qui a en particulier réalisé le récent tram de Besançon un tram « low cost », plus modeste mais apprécié.
Il ne s’agit pas de faire une quelconque publicité à un constructeur, l’éthique de notre association nous l’interdit, mais d’établir une comparaison comme nous l’avions fait pour les 2èmes lignes d’Angers, Le Mans et Orléans en janvier dernier. Il ne s’agit pas non plus de vouloir changer le matériel de Tours qui donne toute satisfaction. Il ne s’agit pas d’oublier que le tram tourangeau a transformé la ville et que les aménagements dits « annexes » ont largement contribué à le faire accepter dans une cité qui au départ lui était hostile. À tel point que chacun en redemande ! On peut dire à ce propos que Jean Germain a gagné de façon posthume son pari.
Le président de l’ADTT termine son introduction en ajoutant que cette présentation devrait nous éclairer sur les choix à faire entre BHNS et tramway, la solution BHNS étant parfois présentée comme miraculeuse pour une 2ème ligne.
Le secrétaire de l’ADTT, Jean-Marie Beauvais, présente l’orateur : Diplômé de l’Ecole Centrale de Paris, Francis Nakache débute sa carrière chez Matra Transport (devenu depuis Siemens) où ses différentes responsabilités incluent le management de projets de métro automatique VAL, en France et à l’étranger. Fin 2005, il rejoint EuRailCo (opérateur ferroviaire, filiale commune de Transdev et RATP Développement) dont il est nommé Directeur Général en janvier 2007. En 2011, il prend la direction générale de CAF France, filiale du constructeur ferroviaire CAF.
UN TRAMWAY MOINS CHER EST-IL POSSIBLE ?
Francis Nakache commence son exposé en précisant d’une part, que la démarche qu’il va présenter n’est pas spécifique à CAF mais qu’elle est aussi celle des autres constructeurs et d’autre part, que la question est tout à fait d’actualité en raison des contraintes budgétaires auxquelles les AO sont confrontées.

1 – le coût du tramway
Puis, il aborde la question du coût du tramway. Hors Ile-de-France, le tramway coûte entre 17 M€ par km (cas de Besançon) et 30 M€ par km. Le bus à haut niveau de service (BHNS), lui, coûte 14 M€ par km (cas du Mettis à Metz). L’écart n’est que de 3 M€ et les constructeurs s’emploient à réduire encore cet écart.
La relative cherté du tramway s’explique d’une part, parce qu’on compare des choses pas tout à fait comparable (on en demande plus au tramway qu’au BHNS) et d’autre part, par la culture ferroviaire qui était celle des ingénieurs qui ont relancé le tramway en France au début des années 80.
En effet, en France, on a profité de la mise en service des tramways pour refaire les villes. Le coût de la rénovation des rues de façade à façade est alors imputé au projet. Par ailleurs, le STRMTG exige des tramways un niveau de sécurité qui n’est pas demandé aux BHNS.
Voyons la décomposition par poste de dépense (annexe au compte-rendu): le matériel roulant ne représente que 18 % du total (15 % à Besançon). Les pistes de réduction ne devront donc pas porter sur le seul matériel roulant mais la remise à plat devra porter aussi sur les autres postes (voie, énergie, …)
2 – les pistes de réduction des coûts du tramway
L’orateur rappelle que beaucoup a déjà été fait pour réduire le nombre de rames à acquérir en diminuant la réserve, par exemple en minimisant l’immobilisation des rames grâce à un système de remplacement rapide des parties défectueuses. Puis, il évoque six pistes de réduction des coûts.
Repenser les besoins : l’Autorité organisatrice accepte-t-elle d’avoir un réseau perturbé à quelques très rares occasions ?
Rechercher le matériel sur catalogue : ne pas exiger un mouton à cinq pattes.
Imaginer de nouveaux composants : prévoir des poteaux de LAC intégrés dans la plateforme.
Simplifier les équipements : envisager des rames unidirectionnelles (une seule cabine, portes sur un seul côté), et des tronçons à voie unique.
Optimiser les systèmes : réduire le nombre de sous-stations (comme à Besançon).
Modifier les règles de la commande publique : la loi MOP rend presqu’impossible la signature d’un contrat couvrant tous les aspects du projet, d’où des surcoûts au niveau des interfaces.
3 – les réponses aux questions des participants
Vient ensuite le temps des questions de la salle. Plusieurs élus avaient répondu à l’invitation de l’ADTT, ainsi que des représentants de Tours Plus et de Fil Bleu. Sans oublier M. Nicolas Rimbaux, journaliste à la Nouvelle République (voir article publié le lendemain) et, bien sûr, de nombreux adhérents de l’ADTT.
M. Cuzzoni, adjoint chargé de la circulation à Tours, s’interroge sur la compatibilité des matériels. M. Nakache cite le cas de Nantes où les rames de trois constructeurs différents (Alstom, Bombardier, CAF) sont entretenues dans le même atelier.
M. Verdier, adhérent de l’ADTT, pose la question de savoir si le BHNS peut être un « pré-tramway ». M. Nakache émet des doutes car il faudrait faire la plateforme avec déviations des réseaux dès le départ et, de plus, avec une emprise plus large, celle du BHNS qui est supérieure à celle du tramway.
M. Degeorge, membre du bureau de l’ADTT, insiste sur la prise en compte des coûts de fonctionnement. M. Nakache approuve et invite les participants à se reporter à l’étude réalisée par Trans-Missions et TTK sur la comparaison entre les tramways et les BHNS (téléchargeable depuis le site de la FNAUT).
M. Denis, élu municipal et communautaire, rappelle que la route, elle aussi, coûte cher : 17 M€ par km de périphérique ! Puis, pose la question de l’intérêt du gaz pour éviter le coût des lignes électriques. M. Nakache cite plusieurs exemples (Saragosse, Luxembourg, Taïwan) où la solution consiste à recharger le véhicule en station, en s’appuyant sur des batteries et des condensateurs.
Le secrétaire de l’ADTT remercie M. Nakache pour son exposé très instructif et invite les participants à se procurer le numéro 11 du bulletin de l’association en vente au prix de 2 €. Puis il revient, à la demande du président, à la question du choix entre tramway et BHNS : certes, le montant de l’investissement initial est moindre avec le BHNS qu’avec le tramway mais si on raisonne en coût global par voyage c’est-à-dire en tenant compte des couts de fonctionnement et du renouvellement du matériel roulant sur toute la durée de vie du projet et en rapportant ce cout global à la fréquentation, fréquentation qui est supérieure avec le tramway qu’avec le BHNS, alors c’est le tramway qui est le moins cher.
